Considérée comme une date bénie, elle fut pour moi l'un des plus sombres moments de notre pays: ce jour-là Robespierre, Couthon, Saint-Just (et des milliers de leurs partisans après eux) sont morts sur l'échafaud. J'ai écrit une pièce sur leurs derniers moments: voici un extrait: la première scène du dernier acte...
(Matin; antichambre du Comité de Salut Public; sur le mur face au public, au centre, est accrochée la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1793; Saint-Just est sur scène, dos au public, regardant fixement le tableau; un temps)
Saint-Just (se retournant, aux gendarmes hors-scène): C'est pourtant nous qui avons fait tout ça!.. (il se retourne vers le tableau) "Le bonheur est une idée nouvelle en Europe" ais-je dit il y a à peine quelques mois. Et elle est manifestement une idée encore trop neuve pour la France... Combien d'armées se sont levées contre elle?.. Combien d'hommes pourtant vertueux n'y ont pas cru?.. Est-ce toi, Révolution, qui après avoir bu le sang de tes ennemis exige maintenant celui de tes amis? Reconnais-tu les tiens au sang souillant leurs mains? Ou sont-ce tes ennemis qui te tuent lentement?.. (un temps) Je t'ai tout donné, Révolution! En toi je voyais la lumière qui guide les hommes vers le bonheur. Je voyais des générations nouvelles éduquées à défendre la liberté, voire à en gagner encore d'autres auxquelles nous n'aurions pas pensé... Je voyais une société où la naissance ne signifiait rien et où le bien-être de tous prévalait sur les ambitions de chacun... Je voyais un monde où les femmes étaient libres et adorées: égales aux hommes tant dans leurs actes que dans leurs paroles... C'est comme ça que je te voyais, Révolution. Et maintenant que je vais mourir je me dis que tu n'as jamais été autant en danger qu'aujourd'hui; et je ne peux même pas lever le doigt pour te défendre!.. Mais qu'a-t-il donc pris à Billaud et à Collot??! Ils sont pourtant tout autant que moi attachés à la République!.. (un petit temps) Fouché... C'est Fouché qui a réussi à les entrainer là-dedans comme il va réussir à faire main basse sur le club des Jacobins... (un temps; s'emportant) Et qu'est ce qu'il me reste maintenant, Révolution?! Je vais être exécuté non-pas comme un homme mais comme un hors-la-loi! Ils ont jeté Couthon dans l'escalier: est-ce digne de toi?!! Et Maximilien qui se fait tirer dessus, et Augustin qui se jette par la fenêtre: pourquoi leur réserver une telle agonie?! Pourquoi n'as-tu pas accepté leur mort? Ta veuve a-t-elle tant besoin du sang des Robespierre?! Et pourquoi m'as-tu pris Philippe?! Son sang était-il trop pur pour être mélangé au mien? Sa tête était-elle trop belle pour s'unir à la mienne?.. (il pleure; un petit temps; il se reprend et regarde fixement le tableau) C'est ça Révolution... C'est cette Déclaration qui te maintiendra en vie dans les heurs les plus sombres... Car tu auras certainement des protecteurs qui te protègeront mieux que nous ne t'avons protégée, et des amants qui sauront t'aimer mieux que nous ne t'avons aimée; mais tes ennemis pourront toujours vaincre tes protecteurs et souiller tes amants. En-revanche ils ne pourront rien devant la toute-puissance de tes principes qui guideront les peuples à-travers les générations... (un petit temps) Et en cela, Révolution, nos vies auront servi à quelque-chose...
(Matin; antichambre du Comité de Salut Public; sur le mur face au public, au centre, est accrochée la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1793; Saint-Just est sur scène, dos au public, regardant fixement le tableau; un temps)
Saint-Just (se retournant, aux gendarmes hors-scène): C'est pourtant nous qui avons fait tout ça!.. (il se retourne vers le tableau) "Le bonheur est une idée nouvelle en Europe" ais-je dit il y a à peine quelques mois. Et elle est manifestement une idée encore trop neuve pour la France... Combien d'armées se sont levées contre elle?.. Combien d'hommes pourtant vertueux n'y ont pas cru?.. Est-ce toi, Révolution, qui après avoir bu le sang de tes ennemis exige maintenant celui de tes amis? Reconnais-tu les tiens au sang souillant leurs mains? Ou sont-ce tes ennemis qui te tuent lentement?.. (un temps) Je t'ai tout donné, Révolution! En toi je voyais la lumière qui guide les hommes vers le bonheur. Je voyais des générations nouvelles éduquées à défendre la liberté, voire à en gagner encore d'autres auxquelles nous n'aurions pas pensé... Je voyais une société où la naissance ne signifiait rien et où le bien-être de tous prévalait sur les ambitions de chacun... Je voyais un monde où les femmes étaient libres et adorées: égales aux hommes tant dans leurs actes que dans leurs paroles... C'est comme ça que je te voyais, Révolution. Et maintenant que je vais mourir je me dis que tu n'as jamais été autant en danger qu'aujourd'hui; et je ne peux même pas lever le doigt pour te défendre!.. Mais qu'a-t-il donc pris à Billaud et à Collot??! Ils sont pourtant tout autant que moi attachés à la République!.. (un petit temps) Fouché... C'est Fouché qui a réussi à les entrainer là-dedans comme il va réussir à faire main basse sur le club des Jacobins... (un temps; s'emportant) Et qu'est ce qu'il me reste maintenant, Révolution?! Je vais être exécuté non-pas comme un homme mais comme un hors-la-loi! Ils ont jeté Couthon dans l'escalier: est-ce digne de toi?!! Et Maximilien qui se fait tirer dessus, et Augustin qui se jette par la fenêtre: pourquoi leur réserver une telle agonie?! Pourquoi n'as-tu pas accepté leur mort? Ta veuve a-t-elle tant besoin du sang des Robespierre?! Et pourquoi m'as-tu pris Philippe?! Son sang était-il trop pur pour être mélangé au mien? Sa tête était-elle trop belle pour s'unir à la mienne?.. (il pleure; un petit temps; il se reprend et regarde fixement le tableau) C'est ça Révolution... C'est cette Déclaration qui te maintiendra en vie dans les heurs les plus sombres... Car tu auras certainement des protecteurs qui te protègeront mieux que nous ne t'avons protégée, et des amants qui sauront t'aimer mieux que nous ne t'avons aimée; mais tes ennemis pourront toujours vaincre tes protecteurs et souiller tes amants. En-revanche ils ne pourront rien devant la toute-puissance de tes principes qui guideront les peuples à-travers les générations... (un petit temps) Et en cela, Révolution, nos vies auront servi à quelque-chose...